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Se noyer dans les cauchemars pour observer ses rêves - Ft Zoroastra
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Celui qui n'a plus rien à perdre est le plus dangereux
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Ferdinand Von Adalbert
Ferdinand Von Adalbert
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Ferdinand Von Adalbert
Mar 13 Aoû - 17:10
Se noyer dans les cauchemars pour observer ses rêves
Cela faisait déjà plusieurs jours maintenant que Ferdinand suivait à la trace Zoroastra. Essayant chaque jour qui passait d'en apprendre plus, de s'améliorer pour elle. Devenir la meilleure version possible du combattant infernal qu'elle souhaitait, pour qu'il puisse enfin se battre en son nom.

Et que leurs rêves deviennent réalités.

Mais à cet instant, il n'y avait que le calme. Après une nouvelle journée de marche et de péripéties, c'était deux corps fatigués qui se retrouvaient autours d'un feu de camps à contempler la merveille de la lune, si grande, majestueuse dans un nouveau coin de Lucarion. Un coin que notre guerrier n'avait encore jamais eu la chance de découvrir, trop dangereux seul probablement, mais aidé et protégé par sa guide sans peur et merveilleuse. Mais à cet instant cette dernière semblait dormir... Ou méditer? Difficile de vraiment savoir avec la Chimère. Toujours est-il que l'humain se laissa aller quelques instants à la contemplation de cette femme aussi surprenante qu'envoutante. Une personne unique à n'en point douter qui ne laissait pas indifférent le fils de Meridiem qui, après tout, avait voué sa lame à cette engeance des ténèbres. Et il ne le regrettait pas, malgré ce qui avait pût se passer.

Mais à force, la fatigue et le crépitement de la flamme devinrent trop fort pour notre protagoniste qui se laissa aller. Sa tête se posant sur un mélange de tissue assez solide pour accueillir sa tête sans lui faire mal le lendemain et, en fermant les yeux, se laissa emporter dans un royaume onirique...

Celui des cauchemars.

Toujours la même chose qui revenait à lui, quand il dormait. Toujours la même image.

Celui de sa sœur qui tombait hurlant son nom, une voix emporté par le vent et les ténèbres. Puis l'image d'un corps, qui semblait sans vie, au sol. Le regard vide, presque morte.

Quand le rideau de sa culpabilité vint à tomber, Ferdinand espérait voir quelque chose de mieux, mais non, il n'y avait jamais de bonheur dans ses nuits de sommeil.

Il se voyait, lui, la tête entre les mains, pleurant. Si jeune, même pas la dizaine d'années. Autours de lui ses parents l'accablant de toute les peines du monde. Un nuage d'insultes, de blessures. Et chaque mot qui faisait mal à entendre provoquant une nouvelle blessure sur le corps de cette image du passé.

Car souvent les mots sont plus tranchant que l'épée hein? Peut-être pas dans la vrai vie, mais dans l'esprit de ceux qui le subissait, c'était une véritable marque sur la chaire, une cicatrice qui ne partirait jamais.

Un nouveau rideau, cette fois-ci plus sombre, aux marques naissantes. Une tache sombre, collante, muqueuse, un souvenir étrange.

Dans ce nouveau souvenir, quelque chose clochait. Pas le faite que ce soit un sempiternel souvenir de ses échecs et de ses horreurs de la vie, non, mais tout semblait différent... Un peu plus terne, un peu plus sombre... Comme si l'éclairage de cette pièce de théâtre n'avait plus la même intensité. Mais cela ne fit rien, car malgré tout, le fils des Von Adalbert continuait de voir le pire de sa vie. Comme quand il avait vue sa sœur blessée car il n'avait pas été assez fort. Et à ses yeux, cet instant était presque comme sa mort à elle, car après cet incident... Le pauvre noble n'avait plus jamais revue sa chaire et son sang.

Abandonné, comme face à une pierre tombale qui ne répondait pas. Ou était-elle? Que faisait-elle? Est-ce qu'elle était heureuse, loin de lui?

Impossible de bouger, alors que tout s'enchainait, le rideau tombant, se relevant encore et encore, toujours plus recouvert d'une immondice sombre, offrant à chaque fois une nouvelle scène, une nouvelle vision d'horreur, toujours plus sombre, toujours plus horrible.

Mort, abandon.

Sacrifice, dépression.

Fautes et blasphèmes.

Tout était cyclique, les mêmes choses encore et encore. Comme un cercle vicieux. Un cercle qui n'attendait que la fin, que la mort pour se briser une bonne fois pour toute.

Spectateur de ses échecs, notre pauvre protagoniste ne pouvait rien y faire. Il était la, impuissant. Le passé ne pouvait pas l'être de toute façon. Mais il restait présent. Il restait la, sous la chaire, dans les cicatrices, dans l'esprit, l'âme et la mémoire.

Un fardeau si lourd à porter. Mais qu'il fallait porter.

Une rage sourde, intense alors que le rideau se fermait pour une dernière fois. Sombre, aussi noir que les ténèbres les plus épaisses. Il n'y avait plus rien de coloré dans ce cirque d'une vie. Si ce n'était un seul clown, l'homme qui n'avait jamais rien accomplit.

Et pourtant, il voulait que sa change. Il ne le faisait plus pour lui. Il ne le faisait pas que pour son aînée. Il le faisait pour Zoroastra aussi. Sa guide, sa lumière, sa sauveuse.

Si elle le voyait ainsi, il était fort probable qu'elle agisse comme la dernière fois... Et ce n'était pas acceptable. Non.

Si d'habitude dans ses nuits de cauchemars il n'agissait pas, trop fragile pour le faire, cette fois-ci, il se senti se lever, plein de rage. Une épée à la main, brandit, déchirant le voile muqueux qui se tenait face à lui. Ouvrant un nouveau rideau qu'il tranchait. Avançant, repoussant finalement toujours plus les dessins de son passé. Coupant ce qui se trouvait en face de lui, fermant les yeux avec rage, se moquant de ce qui pouvait tomber, tant qu'il avançait. Et quand il se mit à ouvrir les yeux... En face de lui de la lumière, nouvelle, belle, pure.

Une vision de rêve. Il voyait Élisabeth, heureuse. Devenue cheffe de famille, les horribles parents étant mort.

Sa cadette, revenue de loin avec un mari soigneux à ses côtés.

Il se voyait, dans une armure flamboyante, protecteur des Von Adalbert. Avec quelqu'un? Non, seul certes, mais ce n'était pas grave. Il n'y avait pas besoin de plus dans ce genre de rêves calme et doux.

Il sentait presque le soleil sur sa peau dans ce royaume qu'il aimait mais qu'il aurait aimé plus aimer encore.

Et dans ce cadre, la seule chose qui lui manquait finalement, était la présence d'une femme pour rendre le rêve toujours plus beau, plus vivant.

Zoroastra. Est-ce que c'était vraiment la vie parfaite, si sa sauveuse n'y était pas? Face au doute, se demandant ce qu'il devait faire de plus, Ferdinand vint à respirer profondément, les yeux fermées, plusieurs secondes. Il avait besoin d'elle... C'était presque devenu un besoin. Sa présence, sa façon réconfortante de l'apaiser...

Et alors qu'il rouvrit les yeux, il n'y avait plus rien. Sauf un immense océan étrange, difforme.

Seul, les pieds dans l'eau, comme si tout ce qu'il avait vue n'avait jamais existé. Et dans cette situation, il n'y eu qu'une seul question, si bête, si simple qui traversa ses lèvres.

"Où-suis-je?"

Demanda alors Ferdinand, à l'eau, au monde des rêves... Et à celle qui pouvait sûrement l'entendre.

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❝ Alors j’ouvre un œil, je rampe et lèche l’eau croupie… Et mes ennemis tressaillent : car de me voir boire, il comprennent que je suis de retour. ❞
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Zoroastra
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Zoroastra
Mer 14 Aoû - 16:27
Thème musical:

L’océan. À perte de vue. Où que se pose le regard, rien d’autre n’attire l’œil que cette vaste étendue, d’un horizon à l’autre : rien que cette mer étrange perdue entre les replis des dimensions, par-delà le voile de la réalité. Aucune échappatoire, aucune sortie, aucune accroche. Pourtant, malgré son étrangeté, il règne ici un souffle apaisant, quelque chose comme un murmure somnolant invitant au repos. Dans le ciel voguent des corps célestes étranges et lointains, de modestes lueurs silencieuses comme des astres assoupis qu’aucun astrologue ne reconnaîtrait. L’eau, si toutefois s’en était bien, reflète de couleurs inhabituelles le spectacle céleste menant sa lente danse, tout juste une onde s’éloignant de chaque pas venant faire perturber sa parfaite surface réfléchissante.

Au milieu de cet ailleurs, le guerrier en exil semble si seul. Rêve-t-il ? Son esprit est pourtant si clair. Il garde conscience de chaque pas l’ayant mené jusqu’ici, conscience de ses souvenirs, il demeure maître de ses mouvements. Et tandis qu’il demande humblement où se trouve-t-il, il n’obtient pour toute réponse que le silence. Avant qu’une voix ne s’élève du néant, comme un murmure ou une tempête, vibrant dans l’air silencieux.

« Enfant de la Terre, guerrier exilé, quel est donc ce feu brûlant en toi, t’inspirant à briser ces chaînes supposées ? »

La voix familière marque une pause, avant de reprendre d’un air plus rêveur, une étrange mélancolie teintant son timbre omniprésent, semblant faire référence aux songes passés. Et tandis qu’elle parle, émerge lentement de l’eau des formes étranges, partout autour du rêveur. Elles se meuvent, elles s’animent, et bientôt prennent l’apparence de silhouettes aqueuses, semblant illustrer les propos de l’être désincarné.

« Cette vie peut se montrer fascinante, merveilleuse même ! Elle nous enchante, nous ravit, au point de nous obséder. Elle nous réjouit de ses atours les plus délicieux, de ses beautés les plus féériques, attirant inexorablement les regards sans que l’homme ne puisse lui échapper. Et c’est dans la paix qu’elle nous offre que nait sa plus grande illusion. Malgré notre souffrance jusqu’ici accumulée, nous oublions ce qui nous anime, nous oublions notre route, notre voie. Nous oublions notre identité profonde. »

Autour du chevalier, du guerrier, les silhouettes et les formes commencent silencieusement leur œuvre, marchant, s’amusant, œuvrant en harmonie. Mais l’une d’elles, dépeignant un guerrier en armure sans visage, déplore sur le sol une silhouette frêle et fragile, inerte et immobile. Toutefois, bientôt s’en détourne-t-il pour en rejoindre une autre et danser avec elle, tandis que sur le sol, la silhouette brisée se désagrège pour retourner à l’océan.

« Elle sait pertinemment que cette douleur est notre force, la source de notre volonté : alors elle nous la retire. Et, en toute indolence, nous rejoignons sa danse perpétuelle avant de, nous aussi, sombrer dans le néant, sans que rien ne change après nous. Et le cycle se perpétue, inlassablement. »

Nombre de spectres liquides s’effondrent et disparaissent, tandis que d’autres émergent peu à peu, rejoignant la danse lente et étrange, la ronde folle autour du rêveur. L’onde continue de vibrer à la surface même de l’eau, la voix reprenant sa parole, cette fois-ci quelque chose de l’ordre du questionnement, de l’interrogation et du doute, s’insinuant entre ses mots et ses paroles, planant sur son esprit.

« Pourtant, ne l’avons-nous pas aperçu ? Son visage, son véritable visage. Celui qu’elle arbore sous son masque : car lorsqu’elle distribue la paix, elle doit bien la prendre quelque part. Elle se sert alors chez les marginaux, les étrangers, les exilés, les déchus, les parias, et les nombreuses âmes oubliées qui ne correspondent pas à sa définition de la justice, du bonheur, du bon, du bien. »

Et autour de silhouettes dansantes, d’autres prennent place : accroupi, allongé et rampant sur le ventre. À l’une d’elles, il manque un bras, à une autre tout un pan de son crâne. Elles rampent faiblement, difformes et laides, leur visage sans bouche incapable d’appeler à l’aide, leurs yeux absents incapables de pleurer. L’une d’elles vient jusqu’à s’agripper piteusement à la cheville de l’arpenteur des songes.

« Il y a toujours un prix à payer, n’est-ce pas ? Un prix duquel l’homme heureux préfère détourner les yeux. Car la vérité entachera son propre bonheur : Je ne suis pas responsable ! S’insurge-t-il. Je n’ai rien fait pour que les autres souffrent ainsi ! J’aide même mon prochain. Je suis une bonne âme : je pense les blessures, je donne un peu de ma propre richesse, je partage un peu de mon propre pain ! Et pouvons-nous le blâmer, lui qui croit sincèrement faire de son mieux ? Est-ce si injuste ? Il s’accroche à une construction, une façade, une chimère, certes. Mais c’est aussi pour lui un monde emplit de bonheur, de splendeur : il n’y a ici que les attraits de la chance et du destin, en quoi serait-il responsable du sort du monde ? Vouloir briser cette apparence, cette illusion, ne s’agirait-il pas là d’une folie, d’un blasphème uniquement motivé par la haine et la rancœur ? »

Sur la scène, les silhouettes aqueuses semblent peu à peu se monter les unes contre les autres. D’abord, s’opposent les silhouettes bien nées de celles souffrant en silence. La danse vire à la lutte, puis au chaos sans forme, où chacun finit par combattre contre tous, sans qu’aucun camp n’émerge réellement. Et la réponse tombe, comme la lame d’une guillotine sur une tête couronnée : tranchante et nette, sans appel, sans pitié, figeant brusquement la scène et les fantômes immobiles dans leur barbarie silencieuse.

« En vérité, par son ignorance et ses yeux qu’ils gardent clos, l’homme heureux a plus de sang sur les mains que tous les miséreux et les désespérés prenant les armes pour survivre. Et le peu de pain qu’il offre gracieusement ne suffit en rien à éponger tout ce sang versé : nous sommes le prix à payer pour que son bonheur persiste. »

Un tremblement anime alors les eaux qui se lèvent lentement sous leurs pieds : émerge une large estrade circulaire, semblable à une scène de théâtre sans public apparent sur laquelle tous opèrent sans distinction. La lutte des silhouettes reprend alors, mais cette fois comme au ralenti, comme si le temps s’écoulait pour elles différemment, s’étendant infiniment pour laisser apprécier la violence de chaque coup, chaque injure sans voix, chaque sanglot qui ne fut jamais entendu. Mais bientôt, semble apparaitre de chaque poignet, de chaque cheville, de chaque nuque, un fin filament de cristal s’élevant vers le firmament, comme une infinité de fils de marionnettes.

La voix, elle, vibre alors d’une intensité nouvelle, un feu crépitant montant peu à peu des entrailles de la nature elle-même. Il y avait ici une haine profonde et tamisée ou peut-être une juste colère, quelque chose comme un tremblement de terre ou un volcan faussement éteint s’apprêtant à entrer en éruption à tout instant, vomissant la géhenne brulante retenue, refoulée trop longtemps, sur la surface du monde.

« Contemple les racines de notre monde. Les hommes sont traités comme des pions sur cette scène factice, tandis que des imposteurs tirent les ficelles dans l’ombre d’une haute montagne, profitant de cette machinerie infecte qu’eux-mêmes ont corrompue, usurpant à l'humanité ce qui lui revenait de droit : nous retenant prisonniers, nous montant les uns contre les autres pour nous éviter de nous libérer. Ni l’homme heureux ni celui qui souffre n’en sortent victorieux : leurs rôles sont parfaitement interchangeables, tous deux sont victimes de la même mascarade. La paix offre à l’homme sa grande illusion, sertissant nos chaînes d’or et de diamants pour que nous puissions à nouveau les accepter, les apprécier. Mais qu’importe combien il est délicieux, qu’importe combien il est exquis : un mensonge demeure un mensonge ! »

Cette dernière phrase éclate comme un coup de tonnerre assourdissant, résonnant à travers la mer des songes d’un bord à l’autre de ses reflets, sous un ciel devenu plus sombre. Sous son onde, toutes les silhouettes sont comme soufflées, reprenant leur nature liquide, renvoyées aux eaux dormantes. La scène s’effondre brusquement. Le silence retombe alors, le calme après la tempête. Et la présence se condense, derrière le guerrier en exil, une silhouette apparait, les bras ouverts, la mine sévère, le regard ardent d’un feu innommable, crépitant des profondeurs abyssales de quelque chose d’inhumain. Et sa voix se fait à nouveau entendre, plus clair, plus présente, plus réelle.

« Il n’existe que deux chemins possibles : hériter de l’ordre de ce monde, perpétuer inlassablement son cycle jusqu’à ce qu’il nous emporte, ou bien le détruire pour de bon. Mon choix a été fait il y a bien longtemps, ma souffrance demeure ma lanterne, la gardienne de ma volonté. Et j’avance ainsi dans l’obscurité que tous redoutent, loin de toute lumière superficielle autre que celle des astres nocturnes : car dans ces ténèbres où je marche, l’or brille aussi fort que le plomb. »

Zoroastra, la sorcière carienne, ferma les yeux un instant, un long soupir s’extirpant d’entre ses lèvres, comme pour extérioriser la tension de son corps, de son âme. Son visage semble se détendre, un sourire plus doux grimpant sur ses joues, elle porte son regard brillant sur son apprenti.

« Bienvenue sur la Mer des Songes, Ferdinand. Ce que tu contemples est le royaume où repose le Premier Rêve. Bien peu d’âmes sont arrivées jusqu’ici avec leur conscience intacte, pourtant notre périple est très loin de toucher à son terme. Enfant de la Terre, es-tu prêt à poursuivre notre route ? »
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Se noyer dans les cauchemars pour observer ses rêves - Ft Zoroastra 27656104fd57cd3a85e820b9f0b4c6b9a136722d
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Ferdinand Von Adalbert
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Ferdinand Von Adalbert
Dim 18 Aoû - 15:37
Se noyer dans les cauchemars pour observer ses rêves
Il aurait dut hurler de peur, de terreur, chercher à se débattre, courir partout où cela était possible face à un univers d'eau et de rien qui s'étendait aux quatre coins de son existences! Est-ce que cela était-il la continuité de son cauchemar? De son rêve? Est-ce que cela était-il au moins une continuité, ou une fin? La fin de sa vie, de son existence? La fin de ses problèmes, de ses drames? Perdu, semblant seul, il n'y avait rien pour guider l'esprit de Ferdinand qui n'arrivait aucunement à contextualiser la moindre chose. Tout ce qui s'offrait à perte de vue en bas, c'était une eau des plus étrange, et tout ce qui se perdait dans l'infini des cieux, c'était des astres sans aucun sens. Et au milieu de tout cela, lui.

Comment réussissait-il à ne pas perdre la raison après tout ce qui venait de s'enchainer dans la profondeur de son subconscient, qui l'avait ainsi mener à... Rien? Tout? Les deux? La seule solution, poser une question, espérer que rompre ainsi le silence avancerait ce scénario sans queue ni tête qui le rongeait au plus profond de lui même, perturbé. Mais pendant une période qui lui semblait longue, trop longue... Rien. Même pas le murmure du vent. Et le bruit de ses mouvements dans l'eau alors qu'il essaye d'avancer. Si l'univers n'a pas de fin, il lui en trouverait bien une au bout d'un moment...

Et au bout d'un moment, venant comme des profondeurs même du royaume des songes, la voix conquérante mais familière de sa guide.


"Zoroastra?"

Demande t'il alors, ne répondant pas à la question posée, se tournant dans tout les sens pour chercher d'où pouvait bien venir cette interpellation mystérieuse. Pour finalement être assaillit par de nouvelles paroles, plus calme, rêveuse, mais toujours aussi impériale pour ses oreilles. Mais ce qui bloqua totalement l'exilé, ce fût bien ce qu'il se passait maintenant dans l'eau. Sous ses yeux, des formes, des êtres, mouvantes. Existantes, prenant ainsi pied sur ce monde en sortant des eaux. Qu'est ce que c'était que ça? Créatures à l’apparence si particulières... Inquiétante, bloquant alors le fils des Von Adalbert dans un stoïcisme parfait, comme s'il était devenu une statue sans âme.

Dans tout cela, dans tout ce spectacle de marionnettes sans fils, les paroles de sa sauveuse se faisait toujours présentes. Contant presque une histoire avec la façon dont étaient posés les mots. Se remettant à vivre en voyant mieux les formes bouger, Ferdinand se rendit compte qu'il était lui même plus spectateur qu'acteur de ce gigantesque et étrange jeu.

Et sous la bénédictions des paroles de celle qu'il avait jurer de servir, il marchait donc, passant à côté des créatures étranges avant de tomber sur une pièce qui ressemblait au drame de sa vie. Un guerrier surplombant une forme briser... Et à la fin, le guerrier abandonnait ce fardeau pour continuer une danse absurde. Choqué, l'exilé se dirigea rapidement vers cette créature à l'agonie, avant qu'elle ne disparaisse dans l'eau... Brisant quelque peu le moral du noble qui sentait pourtant la colère monter en lui.


"Pourquoi l'abandonner ainsi bon sang?"

S'exprima t'il dans une des périodes de silence de sa figure protectrice. Mais comme seule réponse, de nouvelles paroles. Toujours plus profondes, toujours plus intenses. Et au milieu de tout cela, la continuité des danses. Plus proche de notre rêveur perdu, comme s'il était le pilier central d'un spectacle... Un spectacle macabre car, bien vite, s'ajoutant aux abords de tout cela, des formes souffrantes, des formes qui n'étaient pas entière. Comme des rejetés de l'existence ne pouvant profiter des festivités absurde d'une vie qui méprisait ce qui ne rentrait parfois pas dans le moule. Une envie de hurler saisie alors notre protagoniste qui vint à frapper une forme liquide dansante si proche de lui, la faisant probablement s'évaporer et rejoindre l'immensité de cet étrange océan.

Voir ainsi un tel cirque l'enrageait de plus en plus, lui qui voyait ainsi le reflet de son existence. Certains pouvaient profiter de la vie pleinement, s'amuser comme ils le désiraient quand d'autres ne faisaient que vivre dans la souffrance, sans rien d'autre. Cela lui rappelait tristement son aînée qui ne pouvait jouir de plus rien d'autres que la lente attente dans l'agonie de la mort... Serrant toujours les poings, l'une des étranges créatures attira l'attention de Ferdinand, celle qui lui tirait la cheville. Se tournant alors, dépité, il s'inclina, tendant la main vers cette piteuse existence... Qui se mit à se désagréger elle aussi sous les mots toujours plus puissants et intenses de Zoroastra.

Ce qu'il entendait, ce qu'il voyait... Tout cela le rongeait d'une flamme plus forte à chaque instant. L'envie d'hurler, de frapper, de se venger. L'envie d'améliorer les choses quitte à faire couler le sang qu'il ne devait normalement jamais projeter inutilement... Mais ici, dans ce genre d'occasion, ce ne serait jamais de manière inutile. Car ici, il ne voulait pas être dans la section des vivants qui se laissaient bercer par une stupide illusion, oh que non. Lui voulait la détruire pour de bon afin de pouvoir avancer. Que tout le monde puisse avancer. Et pas que de pitres danseurs marchant sur leurs compères qui avaient moins de chance dans la vie...

Et comme un écho à sa propre rage... Toute la scène entra dans la folie de la violence. Créant un chaos sans nom qui fit délicatement sourire Ferdinand qui sentait son âme rongeait par une essence sombre qu'il ne pensait jamais voir naitre un jour. Le carnage... Voilà ce que peut créer une telle folie, seulement de la violence... Et cette violence qui était pourtant mérité pour ceux qui jouissaient du mieux, devait malgré tout être évité pour pouvoir améliorer la vie de tout le monde.

Soupirant face au spectacle maintenant immobile, toujours à l'écoute des paroles de Zoroastra, le noble se remit à marcher délicatement, passant aux côtés des formes maintenant sans vie, observant la scène figé dans le temps, se demandant bien quand et comment cela arriverait réellement partout...

Mais aussi vite que cela s'était arrêté, tout se mit à bouger de nouveau, au ralentie. Accompagné alors de l'émergence d'une nouvelle création des songes. Un théâtre, une scène, et au sommet de tout cela, des fils de cristal qui animait la totalité de cette horreur macabre. Pour compléter le tout, la voix forte et intense de la sorcière, présente comme expliquant la logique de ce monde contrôlé par des formes plus puissantes.

Tout cela paraissait si triste... Servir de pion, d'amusement de forces supérieurs sans amour pour leurs créations ou pire, pour leurs rejetons. Sur cette terre, soumis comme conquérant, changeant de rôle comme on change les pas d'une danse, tous étaient esclave d'un mensonge, d'une vision absurde imposé par des marionnettistes infâme. Et hormis dégouter toujours plus Ferdinand, il semblait n'y avoir rien d'autre à faire...

Tout du moins, seul. Mais comme espoir naissant, libératrice des chaines et des fils, une âme.

Zoroastra. Apparaissant alors derrière le guerrier, la voix devenait d'un coup plus net, plus intense, toujours aussi hypnotisante.

Et aux yeux de notre protagoniste, elle, toujours aussi magnifique. Elle qui souffrait, elle qui avait choisit sa voie, son chemin.

Celle qui avait choisie d'être une voix s'élevant au dessus du vacarme ambiant. La guide que méritait le vivant pour se libérer...

Celle que voulait servir alors sans jamais hésiter l'épéiste qui s'approcha alors plus prêt de la chimère, venant même récupérer délicatement une de ses mains qu'il vint à mettre entre les siennes pour s'assurer de son existence dans le royaume des songes malgré l'explication offerte.

"Je suivrais toute les routes que vous m'ouvrirez, Zoroastra. Et je le ferais toujours avec le plus grand des plaisir."

Dit-il avant d'élever la main qu'il protégeait pour y déposer un baiser chaste sur le dos de cette dernière comme un chevalier faisant honneur à sa protégée.


"Ce que j'ai vue... Tout ce que j'ai vue... C'est d'une profonde horreur... C'est abjecte, sans fin... Comme un cycle se relançant, déformé de la précédente mais identique sur le schéma... Je... Je souhaites poursuivre votre voie, avancer à vos côtés... Tout détruire s'il le faut... Je... Pour vous... Pour nous... C'est ça qui compte... Non?"

Perdue dans un mélange de penser trop lourde et d'envies partant dans tout les sens, Ferdinand vint à rompre le contact visuel avec la Sorcière, secouant légèrement la tête pour retrouver un peu ses pensées...


"Je survivrais à tout les périples, Zoroastra... Pour vous ressembler... Et ainsi, vous servir au mieux..."
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Zoroastra
Zoroastra
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Zoroastra
Lun 19 Aoû - 13:33
Thème musical:

La mise en scène terminée, le calme était retombé sur la Mer des Songes. D’un bord à l’autre, il n’y avait que cette eau stagnante, dormante, paisible et tranquille, parcourue d’un souffle léger sans réelle direction. Ici ou là flottait ce qui semblait être un rocher translucide, le cadavre d’une méduse luminescente, qui bientôt retournerait aux tréfonds de l’abîme. L’endroit était calme, presque hors du temps, comme si chaque seconde durait ici un siècle, ou qu’une éternité passait en un battement de cil. C’était une autre dimension se perdant dans les recoins de notre propre réalité, se glissant dans ses plis, se dissimulant derrière son fin voile invisible.

Zoroastra aimait cet endroit. Il était loin de tout, elle y trouvait la paix, loin des lumières de l’extérieur, au creux rassurant des rêves. Elle avait traversé sur ses eaux ce qui lui semblait être le voyage de plusieurs vies, mais après tout, quel sens cela pouvait-il faire ici ? Malgré cela, elle ne s’en lassait en rien et, si elle avait eu moins de volonté à l’égard du monde extérieur, peut-être serait-elle restée ici quelques éternités de plus, méditant, rêvant.

Elle était heureuse de partager ce passage avec son disciple. D’ordinaire, elle arpentait ces eaux seule : et bien qu’elle ne s’en offusque jamais, trouvant cette solitude revigorante, avoir une présence à ses côtés était un changement de décors suffisant pour stimuler son esprit. De plus, bien qu’elle continuât de croire en leur souffrance, elle savait aussi qu’un peu de calme et de repos étaient nécessaires à leurs esprits.

Quand Ferdinand prit sa main pour l’embrasser, la sorcière ne put s’empêcher de laisser s’échapper un petit rire amusé, mais sincère. Sur le ton de la plaisanterie, elle s’adressa au jeune homme.

« Je mettrais du temps à m’habituer à tes manières de chevalier. On ne m’a jamais traitée comme une dame de la cour ! Enfin, ce n’est pas désagréable pour autant. »

Elle porta ensuite son écoute vers le garçon, ses mains négligemment dans ses poches, ses pieds nus trempant dans l’eau clair et froide. Une mine étrange marqua ses traits, un léger sourire sans joie s’étirant sur ses lèvres tandis qu’elle répondit d’un air absent.

« Ce que tu as vu, ce que je t’ai montré, c’est le vrai visage de cet ordre divin factice. Une mascarade sans fin dont nous sommes tous victimes, que nous le voulions ou non, un mensonge dont nous nous berçons tandis que nous laissons nos vies entre les mains d’imposteurs. Et c’est précisément pour mettre fin à cette absurdité et libérer ce monde que je mène ma quête. »

Elle porta à nouveau son regard vers lui, posant une main douce et forte sur son épaule, un sourire plus sincère étirant ses traits.

« Et je suis heureuse de ne pas être seule dans cette quête. Enfin, avançons, il y a quelque chose que j’aimerai te montrer. »

Sans demander son reste, Zoroastra commença sa marche. Elle avançait sous le ciel constellé d’étoiles impossibles que plusieurs astres semblables à des lunes ou d’autres corps célestes étranges parcouraient paisiblement, modestes embarcations voguant dans le vide du cosmos. Elle ne semblait pas se diriger vers un lien en particulier : de là où ils se trouvaient, tous les horizons étaient égaux. Il n’y avait rien à perte de vue que l’océan, le ciel nocturne, et ici ou là quelques aspérités sur l’eau : quelques ruines de civilisations déchues ou peut-être n’ayant jamais existé, quelques corps sans vie de créatures hypothétiques, quelques rêves échoués et inassouvis à jamais.

Tandis qu’ils avançaient, Zoroastra reprit la parole sans le regarder, sa voix toujours aussi paisible.

« Lors de notre mise en scène, tu m’as posé une question. Lorsque tu as pris avec toi cette silhouette aqueuse te rappelant un triste souvenir. Pourquoi l’abandonner ainsi, tu te souviens ? La vérité, Ferdinand, c’est qu’en quelque sorte, tu l’as abandonné toi-même pendant un instant. »

Son regard sans jugement se posa un peu plus haut, vers les astres nocturnes, tandis qu’elle continuait sa route, expliquant son propos à son apprenti.

« Lorsque tu as fait ce rêve, de la voir ainsi en bonne santé, heureuse et épanouie, mariée correctement, comme elle l’aurait dû dans un conte parfait de chevalerie qu’on pourrait vous enseigner dans vos récits, là d’où tu viens : tu as, pendant un court instant, abandonné cette version d’elle qui fut brisée et mourante sur le sol. »

Zoroastra porta son attention vers son compagnon, une mine sévère sur le visage.

« C’est précisément ce contre quoi je veux te mettre en garde, Ferdinand : même si nous sauvons ta sœur, même si nous lui rendons la vie, tu ne dois jamais oublier. Car si tu oublies, c’est comme si tu pardonnais, c’est comme si tu acceptais, et vous soumettiez, ta sœur et toi, à ce destin cruel. Cela recommencera, encore et encore. Peut-être pas pour toi, mais pour quelqu’un d’autre. Alors, ton bonheur aura pour prix le malheur d’un autre, tant que nous n’aurons pas mis un terme à cette machinerie absurde. Souviens-toi toujours, Ferdinand : oublier, c’est accepter que cela se reproduise. »

La sorcière porta à nouveau ses yeux vers l’avant, l’air plus détendu, guidant le chevalier en exil sur la Mer des Songes, dans une marche qui semblait interminable. Après un nouveau silence, la voix de l’arpenteuse résonna à nouveau.

« À présent, j’aimerai te poser à nouveau ma question, réponds-y sincèrement : quel est donc ce feu brûlant en toi, t’inspirant à briser ces chaînes supposées ? »
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Ferdinand Von Adalbert
Ferdinand Von Adalbert
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Ferdinand Von Adalbert
Mer 21 Aoû - 21:37
Se noyer dans les cauchemars pour observer ses rêves
Pouvoir retrouver Zoroastra même dans ses rêves... Il fallait l'admettre, pour Ferdinand c'était quelque chose de plaisant. L'impression d'avoir avec la Sorcière une relation puissante qui permettait même d'aller plus loin que la frontière du réelle. A moins que cela la puissance de la Chimère qui permettait de faire en sorte que tout cela soit réelle? Probablement plus la seconde possibilité que la première, mais par plaisir personnel, il était fort probable que l'exilé choisisse ce qui lui arrangeait le mieux dans sa vision un peu tronquée des choses. Toujours est-il qu'après ce si long spectacle aussi horrible que frustrant à regarder, le guerrier se mit à revivre de façon un peu plus saine et normal face à quelqu'un de vivant, et surtout, quelqu'un qui ne s'entretuait pas dans une danse morbide et horrible. Ainsi, impossible de ne pas laisser l'essence de son éducation revenir à la charge quand il se mit à prendre la main de sa guide pour y laisser un délicat baiser. Une chose qui, d'ailleurs, amusa son interlocutrice et la fit réagir. Un peu rougissant, détournant le regard, le pauvre humain ne pût s'empêcher de gratter délicatement la partie inférieur de son visage.

"A mes yeux, vous méritez bien plus le respect d'une Dame de la cours que la partie des nobles que j'ai eu le déplaisir de rencontrer vous savez... Si cela ne vous déplait pas, alors je me permettrais de continuer... Vous... Vous méritez tout mon respect après tout."

Sourire en coin, il ne lui fallut tout de même pas longtemps avant de retrouver le courage de retrouver le chemin des iris de sa sauveuse pour entamer un nouvel arc de dialogue un peu plus sérieux que ce mélange de flatterie et de douceur. Face à son interlocutrice qui semblait presque négligente, il se retrouva tout de même bien vite face aux habituelles paroles aussi motivantes que déprimantes de Zoroastra. Des paroles pleine de sens et de profondeur, qui attaquait l'esprit et permettait de réfléchir toujours plus sur les conditions de l'existence aux yeux du fils des Von Adalbert. Ainsi, hochant la tête, buvant la moindre de ses paroles comme quelqu'un qui n'avait pas bue depuis des jours se jetterait à une fontaine, il sursauta quand la main puissante de la Sorcière se posa sur son épaule. Appréciant le sourire et la fin des paroles, il rendit ce symbole de joie, confiant.

"Je vois suis, et je vous suivrais au bout de tout les mondes, Zoroastra."

Frappant alors son torse avec sa main comme le fier guerrier qu'il était, il ne fût alors pas long avant de la suivre. Toujours deux pas derrière elle comme le protecteur qu'il espérait être pour la chimère, il laissa tout de même son regard vagabonder dans l'immensité de l'existence de cet étrange monde de rêve. Qu'était-ce donc réellement que cet endroit? Existait-il en tout instant? Quand Zoroastra dormait? Avec de la magie? C'était si étrange, si passionnant aussi! Mais il ne pouvait se permettre de se perdre éternellement dans ce genre de songe quand sa guide parlait. Reprenant son sérieux, déplaçant son regard vers le dos de la belle Chimère, il écouta donc attentivement. Avant d'en souffrir en comprenant le sens de ses paroles.

Ainsi, la figure avait été lui et sa sœur. Le fait d'y avoir pensé, le fait d'avoir eu cette vision. La potentialité d'oublier, le faite d'être finalement comme le fou qui laissait les choses se faire car il avait son plaisir en obtenant ce qu'il voulait pour retourner suivre la vague d'un monde maudit. Mordant fermement la partie inférieur de sa bouche, serrant les poings, il se sentait comme un imbécile. Cela l'énervait d'avoir... Ainsi été mal guidé par ses émotions. Est-ce que c'est une chose qui pourrait recommencer? S'il était trop faible mentalement? Non, cela ne pouvait arriver... Pas après avoir vu tout cela...

Continuant de se mordre la lèvre de rage, confrontant le regard sévère de sa mentor, Ferdinand abdiqua comme un chien vaincu face à l'alpha d'une meute. Pourtant, le mal avait été fait, il sentait comme quelque chose couler de sa lèvre blesser. Ou alors était-ce son imagination? Pouvait-il saigner dans ce monde? L'exilé ne préférait pas s'en assurer, ajustant son regard pour subir celui de l'iris de son interlocutrice. Continuant de l'écouter, dévoué au maximum. Et quand Zoroastra se remit à marcher, il soupira. Impossible de la contredire, elle avait raison. Tout ce qui lui restait, s'était d'assumer, et faire de son mieux pour suivre les conseils.


"J'ai compris, Zoroastra... Je n'oublierais pas, je vous en fais la promesse. Que ma lame m'emporte si je rompt un jour ce serment..."

Continuant d'avancer aux côtés de la sorcière, il semblerait que cette dernière ne pût s'empêcher de revenir à la charge avec une question déjà posée mais qui n'avait pas eu de réelle réponse. Peut-être que le fils des Von Adalbert avait fait exprès de l'éviter... C'était quelque chose de possible. Ne souhaitant pas spécialement admettre une vérité qui prenait de l'ampleur dans son esprit. Mais ce feu brûlant... Il y en avait plusieurs. Ce n'était pas qu'un seul brasier immense, non. C'était une multitude de flammes qui en formait une plus grande, dévastatrice. Ainsi, quand il trouva ce qu'il avait en tête, il accéléra légèrement le pas pour dépasser sa mentor, afin de mieux s'arrêter devant elle. Se tournant pour faire face à sa sauveuse, Ferdinand vint à déposer ses mains sur les épaules de son interlocutrice avant de plonger ses yeux dans les siens.

"Il n'y a pas qu'une seule flamme qui brûle en moi, comme il n'y a pas qu'un seul marteau qui brise les chaines, Zoroastra." Commença t'il alors, déterminé. "Je souhaites avant tout sauver ma sœur, vous le savez. Mais je veux plus que ça, je veux qu'il ne puisse plus jamais lui arriver du mal. Et pour ça, ce qui me motive de plus en plus, c'est la fin de mes parents. Que ces hideuses personnes ne puissent plus jamais poser leur sales mains et leurs mots sans amour sur la moindre personne."

Sa respiration devenait plus lourde, plus forte. Comme si en parlant, il se sentait réellement emplit d'une rage qui le pousserait à tuer si on lui en offrait l'occasion.

"Mais la plus grande flamme, c'est vous. Vous êtes une grande inspiration, Zoroastra. Par vos histoires, par vos paroles, par vos exemples et vos démonstrations... Je veux pouvoir briser mes chaines pour vous accompagner et briser à mon tour d'autres collier de métal. Sans vous... Il n'y aurait jamais eu de première braise après tout. Et sans vous... Je sais que je n'aurais jamais pût envisager d'être un jour libre..."
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Zoroastra
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Zoroastra
Sam 24 Aoû - 19:54
Thème musical:

Zoroastra continue son avance sur la mer des songes. Partout où que l’œil se pose, le même décor étrange se répète à l’infini : une infinité aqueuse, silencieuse et sereine, sans une île ni un morceau de terre. Tout juste quelques aspérités absurdes dérivant à la surface de l’eau. Ici, voici qu’émerge un arbuste sans vie à l’écorce blanche, dénudé de la moindre feuille, semblable à une main squelettique figée vers le ciel. Plus loin, voilà qu’une sphère de verre brisée et creuse git au milieu de ses fragments chatoyants, ne laissant rien deviner du mystérieux trésor qu’elle contenait autrefois. Il y a ici un ours en peluche abîmé, un journal poussiéreux, une étoile échouée, un souvenir n’ayant jamais eu lieu, un rêve trop tôt brisé. Rien ici ne semblait avoir de sens, et pourtant l’âme semblait entrer spontanément en résonance avec la quiétude de ce lieu.

Elle semble satisfaite de la réaction de Ferdinand. Il ne se lamente pas, se contente simplement de comprendre son erreur et s’efforce de ne pas la reproduire : la sorcière n’en attend rien d’autre. Elle se contente d’acquiescer sans plus le regarder, le guider sur les eaux, suivant un chemin qu’elle seule semble percevoir, sans qu’il n’apparaisse le moindre élément concret pour guider son itinéraire. Pas plus ne pouvait-elle se repérer aux étoiles, deux simples coups d’œil suffisaient à mettre en évidence l’étrange phénomène : le ciel change perpétuellement. Voici que trois lunes gravitent au-dessus de leurs têtes. Au battement de cil suivant, un astre entouré d’anneaux rejoint la dance. Encore un battement de cil et les lunes ont disparu, laissant voir quelques corps célestes aux couleurs chatoyantes. Jamais deux fois le même ciel, rien de perpétuel, mis à part peut-être l’océan.

Voilà soudain qu’après sa réflexion, son apprenti la dépasse et se place devant elle. La chimère l’observe, intriguée, penchant légèrement la tête sur le côté, écoutant attentivement les mots qu’il choisit. Son regard serein luit de quelque chose de doux, crépitant comme la braise réconfortante dans le feu. Et à mesure que ses mots s’agencent et se déversent, ils semblent alimenter la flamme dans le regard de la sorcière. Un léger sourire s’étire au coin de ses lèvres, et malgré le calme apparent de sa posture nonchalante, son élève peut deviner sans difficulté ce feu si coutumier qui s’éveille dans ses yeux.

« Si ce sont les souhaits que tu fais, Ferdinand, je t’aiderai à les accomplir. » La sorcière pose une main sur l’épaule du jeune homme. « Un jour, nous parviendrons à Meridiem. Là-bas, nous trouverons un moyen de sauver ta sœur, et nous laisserons ton âme décider du sort de tes bourreaux. » La poigne de Zoroastra se serre sur l’épaule musculeuse, imprégnant dans sa main sa propre force, tandis que son regard ardent plonge profondément dans le siens. « Qu’ils craignent le jour de ton retour comme la juste rétribution pour leurs actes passés, et que leur châtiment serve d’exemple. »

Après avoir imprégné ses derniers mots de sa volonté de justice, elle avance à nouveau et dépasse son apprenti, avant de reprendre sa route ainsi que la parole. Ses mains jointes dans le dos, elle semble continuer de réfléchir à mesure qu’elle s’adresse à lui.

« Je suis ravie de t’inspirer à suivre mon exemple. Mais si cela t’est utile aujourd’hui, souviens-toi que ce n’est que la première étape. Tu dois être capable de voler de tes propres ailes, de forger tes propres souhaits avec ton feu intérieur. Ainsi baignés dans les flammes de ton âme, ils seront plus indestructibles que l’acier, car ils deviendront des rêves. Et les rêves sont immortels. »

À ces derniers mots, elle porte à nouveau son attention sur son disciple, une expression bien plus sérieuse sur le visage. Sa voix se fait plus profonde et assurée, moins rêveuse : elle enseigne, elle éclaire, elle prodigue. 

« Chéris ta souffrance, car elle te rappelle le chemin parcouru et ce pourquoi tu te bats. Attise ta colère, car elle arme ton bras contre l’injustice. Éclaire ton esprit, qu’il t’évite les pièges et les tentations dans ta quête. Ouvre ton cœur, afin d’y recevoir le monde. »

Un léger sourire, plus doux, éclaire son visage dans le silence qui suit ses mots. Après quoi, la sorcière onirique reprend sa route sur les sentiers invisibles où elle guide son disciple. Une nouvelle question s’échappe de ses lèvres, sur un ton plus léger, presque une simple conversation.

« Je t’ai dit que ce lieu était la Mer des Songes, et qu’ici repose le Premier Rêve. Que penses-tu que cela signifie ? Qu’évoque cet endroit à ton cœur ? Et où penses-tu que je te mène ? »
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Ferdinand Von Adalbert
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Ferdinand Von Adalbert
Mar 27 Aoû - 0:32
Se noyer dans les cauchemars pour observer ses rêves

Nul doute que sa mentor semblait fière de lui. Cela se voyait dans ses yeux. Ferdinand avait trouvé les mots justes, la bonne mentalité. Et peut-être pour la première fois de sa vie, voir dans le regard de quelqu'un quelque chose d'aussi beau, mélangé à la flamme ardente qui caractérisait Zoroastra... Oui, avec ça, l'exilé se sentait enfin à sa place. Et cette sensation unique qu'il chérirait à présent jusqu'à sa mort, il ferait tout pour qu'elle perdure. Qu'il faille pour cela salir ses mains de sang. Ou teinté son âme de certaines hérésies. La Chimère lui apportait quelque chose qu'il n'avait jamais connu, et bon sang, c'était addictif. S'il pouvait boire cette sensation, il irait jusqu'à la mort pour s'en abreuver.

Face à la poigne intense de sa comparse, face à ses paroles et l'ardeur qu'elle y mettait, le fils des Von Adalbert hocha rapidement la tête, montrant sa détermination à accomplir tout ce que venait de dire la sorcière. Affichant un sourire sincère, sûr de lui, d'une certitude qui n'avait rarement frappé l'âme de notre guerrier, il posa délicatement sa main sur le bras de sa mentor.


"Avec vous à mes côtés, je sais que je n'ai rien à craindre Zoroastra. Ensemble, nous ferons en effet s'abattre la véritable justice sur ceux qui ont décidés de jouer avec la vie des autres. Et nous punirons ainsi à leurs juste valeur chaque coupable."

Peut-être était-ce la rage qui brûlait bien trop fortement en Ferdinand pour qu'il récupère le semblant de raison de l'âme pure qui sommeillait normalement en lui. Peut-être était-ce les entrainements de la Chimère qui lui offrait cette vision plus direct de la situation injuste qui régissait normalement sa vie. Quoi qu'il en soit, c'était une façon d'exister qu'il approuvait de plus en plus. Et son âme comme son épée semblaient avoir soif, soif de justice. Mais aussi la soif de servir la figure rebelle qui reprenait alors maintenant sa marche, suivit bien rapidement par l'exilé.

Toujours à quelques pas derrière cette dernière, le guerrier ouvrit grand ses oreilles quand elle se remit à parler. Après tout, chacune de ses paroles étaient importante, une façon de s'ouvrir toujours plus, une leçon, une morale. Le moyen de mieux porter son regard sur l'horreur du monde. Ici, les paroles de cette sainte nuit se rapportait plus sur le faite de voir les choses de façon plus solitaire. Zoroastra semblait souligner le faite que notre protagoniste puisse aussi suivre seul ses propres batailles. Voler, brûler comme le soleil et emplir le ciel de ses rêves pour les rendre immortel comme les étoiles. S'apprêtant à répondre, il s'arrêta avant même d'entrouvrir les lèvres quand cette maitresse des abysses se retourna. A cet instant, dans son regard, sur son visage, elle était sérieuse.

Pas du même niveau que lors de la leçon plus physique, mais encore une fois ses enseignements étaient la. Prodiguant alors des conseils d'or pour notre protecteur. Tout ce que souhaitait sa mentor, il le ferait. Comme l'aveugle suivant ainsi les paroles du sage, afin de pouvoir vivre sans vision. Il savait qu'il approchait de cette étape cruciale. Celle où le sage serait moins présent, probablement pour aider d'autres aveugles, et alors, à ce moment la...


"J'honorerais vos enseignements, Zoroastra. Le jour où mon envolé se fera, et si nos chemins à un moment doivent se séparer, je saurais retenir ce que vous m'avez enseigner. Même loin de vous, ma souffrance sera mon épée. La colère mon bouclier. J'agirais selon mon but, mes rêves. Tout en continuant d'agir aussi pour l'intérêt du plus grand nombre, afin d'arrêter la folie qui nous guettes... Vous êtes... Je... Je ne pense pas qu'il y aurait assez de mots pour vous couvrir de la gloire que vous méritez, alors je ferais en sorte de le faire par mes actes. Pour vous, ma Dame."

Toujours sur sa trace, pour le moment, tout ne semblait pas terminé, ce qui le soulageait. Il était trop tôt pour se défaire de la belle Dame, non? Si un jour il pouvait-être prêt, il espérait cependant que cela soit le plus loin possible.

Retrouvant petit à petit ses pensées, la Chimère revint alors à la charge, toujours aussi énigmatique. Toujours pleines de questions et d'intrigues. Réfléchissant, marchant en posant délicatement son index sur son menton en regardant alors le ciel, Ferdinand s'essaya alors à la logique.


"Je suppose que le premier rêve c'est... La première fois qu'une âme c'est embrasé pour quelque chose? Pour un but qu'il souhaitait accomplir? Créant alors une résonance dans cet océan? Pour ce qu'il m'évoque... Difficile à dire, tout change, tout le temps. Tout semble si immense, hors d'atteinte... Ou tout du moins, difficile à atteindre? Comme... Je ne sais pas, un reflet de la vie? Chaque chose demande des sacrifices, de la souffrance pour avoir son rêve?"

Ferdinand ne savait pas non plus réellement où aller. Ce genre de philosophie était malgré tout encore assez nouveau pour lui. S'y habituer... Demanderait du temps. Il mettait parfois du temps pour percuter convenablement les enseignements de sa mentor et ici... Il cherchait à comprendre la conversation.

"J'aurais dit que vous m'accompagnez au dernier rêve, mais je dirais qu'il n'y en a jamais réellement de derniers dans un monde cherchant toujours à atteindre de nouveaux but alors... Dans la désillusion? Quand un rêve se brise, je suppose qu'il doit laisser un impacte? Ou au contraire, à la première réalisation?"

Continuant d'essayer, le visage de Ferdinand affichait plutôt l'échec de sa propre compréhension plutôt que la moindre once de joie. La peur de décevoir alors sa mentor l'accablait quelque peu, pourtant, il souhaitait reprendre un peu la conversation pour ne pas finir sur le carreau.

"Quoi qu'il en soit, j'ai hâte de savoir où vous me guider, ma Dame. Je n'ai aucun doute sur l'enseignement que j'en tirerais."
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Zoroastra
Ven 30 Aoû - 15:56
Thème musical:

Elle l’écoute d’une oreille attentive sans pourtant tourner son regard vers lui, avançant sereinement sur les eaux calmes et tranquilles de la Mer des Songes. Ici, plus que n’importe où, son âme semble apaisée, comme un fragment retrouvant sa place dans un tout. Le feu brûle toujours dans son âme, mais ici il semble être comprimé par autre chose, comme existant sous un océan qui apaise sa souffrance, calme sa fureur, endors de sa froideur l’ignition de son existence. Ici, elle semble se ressourcer, sans pour autant jamais pouvoir oublier. Il émane de la sorcière une aura de quiétude inconnue, quelque chose de reposant, comme une lente mélopée perpétuelle et lancinante, quelques notes de harpes cristallines, le chœur de voix éthéré audible uniquement par l’âme du voyageur.

La paix.

La quiétude.

La sérénité.

Des mots d’ordinaire si loin de son esprit incendié, brûlant constamment d’un feu abyssal. Et, sans peut-être qu’elle ne puisse l’admettre pour elle-même, elle aimait pouvoir prendre le temps de souffler, de reposer cette âme incandescente dans ce corps étranger comme une fiole de verre : la baigner dans l’eau froide juste un instant, le temps d’un sommeil – ou peut-être d’une éternité .

Dans une autre vie, peut-être aurait-elle pu apprécier. Peut-être se serait-elle contentée d’arpenter librement le monde, de voyager librement d’un bout à l’autre de la carte, et apprendre chaque secret caché dans ces merveilleux recoins. Graver dans son esprit le gout de chaque fruit juteux, la fragrance de chaque fleur parfumée, la beauté de chaque paysage, le chant de chaque oiseau. Peut-être aurait-elle écouté chaque histoire que ce monde avait à offrir, découvrir chaque personnage de ce vaste récit. Simplement observer, apprendre, aimer.

Ou peut-être ne serait-elle jamais venue au monde. Peut-être serait-elle restée à jamais dans l’inconscience et le néant, là où rien ne vit ni n’existe. Là où rien ne souffre.

Mais elle vivait.

Ô oui, par tous les dieux et par tous les blasphèmes, elle vivait. Contre toutes probabilités, contre toute loi naturelle, contre toute raison, terriblement, elle vivait ! Et si sa conscience était venue à l’existence, c’était pour porter sur ses épaules la souffrance de ce monde. Elle était née de cette souffrance. Car elle était devenue sa réponse, sa réaction naturelle pour se libérer, elle était sa solution enfantée. Cela formait toute son essence, chaque particule de son âme, chaque atome de son corps. Et la souffrance de ce monde alimentait son feu. De haine, de colère, de douleur, d’espoir. Elle est ce feu. Il est son essence même.

Et si feu elle devait être, alors elle brûlerait sans aucune retenue, et deviendrait l’incendie le plus vaste que Nymlerith ait porté.

Revenant à la réalité de l’instant présent, happée hors de ses étranges réflexions par les paroles de son apprentie, elle secoue légèrement la tête, semblant sortir d’une étrange méditation. Autour d’eux, alors qu’elle s’était mise à rêver, l’océan du temps avait pris un aspect inquiétant. L’eau azure tournait peu à peu au mauve avant de virer à l’encre noire. Les cieux se faisaient plus sombres et des formes semblaient ici et là de la surface de la mer. Quelque chose comme une motte de terre, une boue de limon sombre, parfois brûlante d’un feu spectral à la couleur éthérée. Elles ressemblaient à des cloques boursoufflées, des croutes spumescentes d’ichor noir, et des tumeurs vivantes, pulsant d’une vie contre nature. Était-ce une région particulière de ce monde onirique, ou bien était-ce l’esprit divagant de la sorcière qui avait manifesté ces étranges apparitions ?

Le regard ailleurs, l’esprit hagard, Zoroastra continue sa marche implacable aux milieux des eaux devenues boueuses, charriant dans ses remous nombres de rêves brisés, de souvenirs perdus, d’espoirs inassouvis. La sorcière ne semble pas s’en soucier, se contentant de lever le pied plus haut pour éviter un obstacle, d’une démarche étrangement semblable à celle d’une somnambule.

« J’aime tes réponses. Mais personne ne rêve ces rêves-là. Sinon, ils ne seraient pas perdus sur cette mer. Contrairement à la vie, le songe n’a sensément pas besoin de souffrance. Il existe, change et se perpétue, tout simplement, en toute innocence. »

Elle parle d’un air absent, étrangement sans conviction, récitant presque machinalement la loi engravée dans ses rouages, la vérité qu’elle connait par cœur.

Une sensation étrange commence à se faire de plus en plus pesante autour d’eux, comme une pression omniprésente appuyant sur les épaules, oppressante sur leur cage thoracique, leurs cranes et leurs esprits. Il devenait difficile de respirer, l’air semblait si lourd et sombre qu’il en devenait quasiment liquide. Une odeur de décomposition émane de l’eau stagnante, comme s’ils marchaient sur un gigantesque cadavre en proie aux vers et aux moisissures, là où les courants ne circulent plus et où le cancer grandit. Plus ils avancent, plus le limon gagne de l’emprise, recouvrant bientôt totalement les eaux en un îlot boueux et semblant odieusement vivant. Pourtant, ici et là, sur l’îlot de boue poussent quelques fleurs d’argent, semblant chargées de souvenirs et d’éclat de mémoire. Jusqu’à ce qu’une forme monstrueuse s’affiche dans le lointain obscur d’un horizon enténébré.

« Ce n’est pas la désillusion que je t’emmène observer. Pas plus qu’un rêve brisé. Celui-ci ne se brisera pas, jamais : car il est intrinsèquement lié au Premier Rêve. »

Un sourire étrange et inquiétant s’ouvre en balafre sur le visage de Zoroastra, soulignant ses yeux suintants et sombres de quelque chose de profondément malade, une petite lueur d’abysse logée au fond d’un puits sans fond. Bientôt, face à eux, la silhouette se dessine.

« Ce que je t’emmène voir, c’est mon propre rêve : la marque de ma quête, la souffrance que je porte, mon arme contre les dieux. Et, peut-être, le dernier des rêves. »

Une énorme sphère sombre au reflet crépusculaire, comme un soleil mort. Echouée de la voûte céleste ici sur la mer des songes, pulsante horriblement d’une vie blasphématoire comme un cœur titanesque arraché de la cage thoracique d’un dieu. S’écoule de cet astre noir comme un sang licoreux, le limon corrupteur qui s’étend sur les eaux, là où les courants ne tournent plus, là où le changement ne fait plus son œuvre. Il alimente le cancer enraciné dans le rêve, son îlot sans espoir de chaos informe et de fleurs fragiles chargées de pensées. Et prend racine dans le rêve l’horrible résultat du blasphème originel, la conséquence du premier péché. Le songe sans vie que les dieux redoutent. L’erreur de la nature nait de la folie, de la souffrance et du désespoir. L’appel déchirant d’un monde à l’agonie, à retourner au chaos primordial, pour arracher la terre à la tyrannie, et rendre à la nature ses droits, afin d’enfanter un nouveau monde. Le désir assoupi, purulent, suintant, mais toujours inexpugnable de vivre et de se libérer, coûte que coûte.

Le songe d’un crépuscule.

« Le dernier rêve que je ferais. »
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Celui qui n'a plus rien à perdre est le plus dangereux
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Ferdinand Von Adalbert
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Ferdinand Von Adalbert
Dim 1 Sep - 1:31
Se noyer dans les cauchemars pour observer ses rêves

Il était dur parfois d'être sur la même longueur d'onde que sa sauveuse. C'était un esprit si particulier. Rebelle, cherchant la liberté. Souffrante dans une folie inspirante. Mais même si notre guerrier faisait de son mieux, parfois sa plus grande crainte était simplement de passer à côté des enseignements de Zoroastra. Ainsi doutait-il. De lui, bien entendu. Le Protecteur ne pouvait certainement pas douter d'elle. A un moment, peut être que oui. Lors de cette soirée où le duo s'était blessé jusqu'au sang. Jusqu'à la douleur. Mais même la, cela n'avait été que temporaire. Ferdinand se souvenait de chaque coup sur son corps. De l'impacte de son coup sur la carcasse de sa mentor. Mais rien de tout cela ne valait la douceur de son étreinte. La douceur de ses soins. Ce jour la, oui, il avait compris la leçon la plus importante de sa vie. Mais toute les leçons de la Chimère étaient importantes! Alors en louper une? Ce serait la un immense désastre... Une chose qu'il ne pouvait se permettre. Jamais. Alors l'exilé faisait de son mieux. Réfléchissant un peu plus loin que ce qu'il pouvait faire habituellement. Essayant de prendre la question posée dans d'autres sens. Il devrait bien y avoir une possibilité où ce qu'il disait ne serait sûrement pas stupide, mais cohérente. Tant qu'il pouvait continuer de voir la fierté dans le regard de sa sauveuse... Cela continuerait de le guider sur le bon chemin. De continuer à agir dans la bonne direction. Celle de la Sorcière.

Mais pourtant, malgré son envie, malgré ses réflexions, malgré ses tentatives... Rien. La voix de sa guide n'avait plus une once de vie. Comme si ses paroles étaient mécaniques comme un marteau frappant le fer de façon machinal. Sans vie ni émotion. Elle aimait ses idées mais... Pourquoi sa voix ne le montrait pas? Avait-il échoué encore quelque part, offrant ainsi une torture à vivre pour le fils des Von Adalbert? Impossible de vraiment le savoir. Mais à ce moment la plus grande douleur du noble c'était probablement de ne jamais réussir à comprendre pleinement sa mentor. Comme un mur potentiel qui ferait en sorte de la rendre pour toujours Impossible à atteindre. Ainsi, restant silencieux, le regard perdue, Ferdinand vint à se gratter l'arrière du crâne, ne sachant quoi dire ou faire hormis suivre Zoroastra.

Puis soudain, en pleine marche, tout se mit à changer. L'atmosphère d'abord. Si lourde. Pesante. Irrespirable. La marche de notre protagoniste vint à se faire plus lente. Plus difficile. Que se passait-il enfin? C'était horrible... La vision troublée par l'air presque palpable n'étant rien face à l'air immonde qui donna des hauts le cœur à notre guerrier en bien mauvaise position. Si ceci était un rêve, il méritait plutôt le titre de cauchemar. Infecte. Terrifiant. Si sombre. Manquant plusieurs fois de sombrer dans le limon qui était presque omniprésent, c'est a présent la peur qui gagnait Ferdinand. Où était-il bordel? Cherchant des yeux la silhouette de sa cheffe, l'homme n'arriva pas à prononcer le moindre mot. De crainte que l'air ne l'empoisonne encore plus. Pourtant, malgré la situation. Malgré la forme inquiétante au loin, Zoroastra continuait de marcher. Reprenant la parole, restant encore dans le floue sur ce qui était leur direction. Laissant alors le pauvre noble dans l'ignorance. Pourtant, il ne rechigna pas. Malgré le dégoût et la peur il la suivait. Il voulait comprendre. Il voulait la comprendre. Ne plus être dans l'incompréhension. Quitte à mourir dans ce rêve.


Sans avoir la chance de voir le visage de sa mentor, cherchant à comprendre la forme qui se dressait face à lui, l'inquiétude et la crainte continuaient de grimper en flèche chez le guerrier qui avait l'impression de pouvoir s'effondrer après chaque pas. Mais tout cela... Tout cela vint à changer quand Zoroastra reprit la parole. Quand elle expliqua enfin le but de tout cela. Le point final de cette exploration. Son rêve. Son dernier rêve. Et son apparence était...

"Magnifique"

Exprima Ferdinand dont les genoux vinrent à céder sous le poids de l'horreur.

Magnifique oui. Comme Zoroastra. Il avait l'impression en posant ses yeux sur cette monstruosité blasphématoire pouvoir enfin comprendre la Chimère. Une compréhension qu'il cherchait. Qu'il désirait. Plus que tout autre chose, plus que la vie de sa soeur.

Et il semblait enfin toucher du doigt ce but.


Il ressentait la souffrance de l'instant. L'horreur. La détresse de tout ce qui gravitait autour de lui. Une horreur profane oui. Mais alors?

"Car dans toute souffrance nait une force... De cette force, maîtrisée nait l'espoir..."

Commença alors Ferdinand.


"Du sang coulant sur la terre, renaîtra de nouvelles vies... Et du sang manipulateur des Dieux viendra un monde meilleur."

Un rire. Sincère. Fou. Puissant. De cette cage thoracique se soulevant, Le fils des Von Adalbert s'écroula à quatre pattes. Les mains dans la corruption. Le visage si proche de l'infâme limon. Et pourtant l'odeur ne lui faisait plus rien. Même, cette texture sombre, semblable au sang que versait sa mentor... Il voulait la toucher. La comprendre. Comme il comprenait sa guide.

Sa guide. Oui. Elle aussi souffrait. Elle lui avait dit. Ses souffrances... Elle s'en servait. Mieux que lui. Mais maintenant il comprenait pourquoi. Dans ce monde. La fin de tout. Et le début qui viendrait ensuite. Un crépuscule pour accueillir l'aube.

Une aube de jours meilleurs.


"Votre rêve! Votre souffrance! J'y vois plus claire Zoroastra!"

S'exprimait alors le guerrier qui se releva en sursaut. Les bras coulant d'une substance sombre. Les jambes tout autant recouvert.

"Vous êtes... Vous êtes l'incarnation de l'espoir!"

S'écria t'il alors, s'approchant de sa camarade. Posant alors ses mains sur les épaules de la Chimère. Plongeant son regard corrompue par la folie dans ceux de Zoroastra.

"Un rêve libérateur, pour tous, c'est cela? Une dernière arme pour qu'il ne puisse plus jamais avoir besoin d'armes."

Étreignant de toute ses forces sa sauveuse, Ferdinand se mit à ricaner de nouveau de manière presque incontrôlée.

"Je veux pouvoir être comme vous... Zoroastra... Rejoindre votre fardeau... L'espoir que vous représentez pour les aveugles et les clairvoyants... Je veux être votre bras armé... Pitié... Maintenant que j'ai vu cela... Je ne veux plus jamais être un aveugle..."

Puis, en se décolant pour observer l'iris de sa mentor, Ferdinand vint à coller son front contre celui de cette dernière.

"Milles blasphèmes... Milles profanation... Pour que plus jamais un seul fil de marionnettes ne soit utilisé... Et vivre libre..."
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Zoroastra
Mer 18 Sep - 15:45
Thème 1:

L’incarnation de l’espoir ?

En voilà une idée amusante, de quoi arracher un sourire sans joie à la mine sombre de Zoroastra qui observe son rêve, une lueur vide dans le regard, son cœur battant lentement dans la poitrine. Quelle étrange ironie. Puis voilà que son apprenti la prend entre ses bras, l’enlace et lui offre sa chaleur. Son rire résonne dans le songe obscur, éclat parmi les éclats, comme les vagues de l’océan furieux venant éclabousser les hautes falaises de granit. D’abord, elle est surprise, elle écarquille les yeux, puis quand il vient poser son front contre le sien, son visage s’adoucit. Un léger sourire monte sur ses lèvres sous ses yeux clos, ses doigts viennent caresser sa joue, avant qu’un son émerge de sa bouche, sa voix se glissant comme un murmure entre les deux rêveurs.

« Tu commences à comprendre. »

Autour d’eux, des formes émergent de la boue. Des silhouettes laides et grotesques, pour certaines, humaines, pour d’autres trop difformes pour que l’on en soit certain, composées du même limon noir qui suinte de chaque pore de cet endroit. Ils entourent les protagonistes, leurs visages distendus par la gravité et la boue qui ne se maintient pas. Zoroastra ne semble pas s’en soucier, restant ainsi contre son apprenti. Voilà qu’une des créatures boueuses révèle de derrière son dos un étrange instrument : semblable à un violon visqueux dont il commence à chatouiller les cordes du bout de son bras-archer. Un autre rejoint bientôt la mélodie de quelques notes grattées sur une harpe de limon, avant qu’un troisième ne se joigne au récital de percussion sur un tambour comme un bubon distendu.

Elle glisse ses mains sur ses épaules, lentement, soyeusement caresse sa silhouette, dessine la forme de chaque muscle sous son vêtement de voyageur. Sa main gauche descend se poser sur sa hanche. Sa main droite remonte son bras avant de se saisir avec fermeté et douceur la sienne, puis la redresse. Et, sans relâcher sa prise sur lui, fait un pas sur le côté, l’entraînant dans son mouvement. Puis un autre, dans une autre direction. Et un troisième. Elle gardait le front contre le sien, avant de redresser le menton, un sourire plus large sur les lèvres, une lueur ardente brûlant dans ses yeux.

Et dans la musique jouée par l’orchestre symphonique à l’allure inquiétante, Zoroastra entraine son acolyte dans une valse passionnée au milieu du songe crépusculaire, guidant son apprenti sur l’île absurde et maudite, cette vaste tumeur au cœur de la mer onirique. Inversant les rôles de la galanterie, elle mène le pas, impose le rythme et insuffle le mouvement. Entre ses bras, elle fait tourner, valser, tournoyer le chevalier, toujours ce large sourire aux lèvres, son regard suintant d’une douceur étouffante, d’une tendresse vénéneuse.

« Tu peux devenir à mon image. Je peux te façonner dans la boue et la souffrance, te forger dans les flammes de l’espoir. Tout ce que tu as à faire, c’est suivre mes pas. Alors, nous danserons, sur les cendres de ce monde, jusqu’à la fin de cette mascarade. Jusqu’à ce que cet odieux mensonge ne soit plus que ruine, nous danserons inlassablement. »

Autour d’eux, l’orchestre continue son récital endiablé, tandis que le monde change peu à peu, évolue et mute au gré des notes de musiques. Les monticules de boue prennent la forme de petites collines, de forêt miniature de bois sombre, et de nombres de bâtiments, des bicoques et des masures, des champs et des temples, des palais et des fortins, tout autour d’eux, en une réplique miniature et parodique d’un monde extérieur à ce rêve, au sein duquel pourtant ce dernier grandit. Et des habitations, de petits personnages de limon s’animent et s’agitent, s’extirpent et mènent eux aussi leur course folle, leur danse damnée comme des fourmis s’agitant en tout sens.

Alors, au milieu de ce microcosme de limon et de noirceur, leur valse continue de tournoyer, au rythme de la mélodie lancinante et folle qui règne dans son esprit. Un pas, puis deux, puis trois, ils tournent pour l’éternité, elle mène et il suit. Et le monde se découvre, le monde s’anime, le rêve prend vie, suivant lui aussi l’entrainante mélodie. Et ils continuent de danser, elle le guide vers les hauteurs d’une colline biscornue à la courbure impossible, aux abords de l’astre noir qui couve et suppure au centre du songe. De toute sa masse et de toute sa gravité en contrebas, il semble écraser le monde purulent et visqueux, ignoble cancer ayant pris racine au cœur de cette réalité.

« Mon rêve sera de tous le dernier. Je libèrerai ce monde dans la joie et la vérité. J’en fais la promesse, moi, Zoroastra. Si je dois incarner l’espoir, qu’il en soit ainsi. Je ne reculerai devant rien, car je ne suis pas seule, une légion marche dans mes pas. »

Soudainement, elle bascule son partenaire en arrière, le retenant au-dessus du sol, son regard dévorant plongée dans le sien. Sa main forte dans son dos l’empêche de chuter, son autre main caresse ses cheveux, replaçant tendrement une mèche derrière son oreille. Elle descend frôler sa joue, glisse contre sa gorge vulnérable, puis se pose sur sa poitrine, contre son cœur battant. Son sourire comme une faille béante de douceur et d’horreur balafre son visage comme une lune sans lueur.

« Tends l’oreille et écoute, ce que portent les vents : le grand vol des oiseaux, la beauté de leur chant. Ils tournoient et annoncent la parole féconde. Ils murmurent et proclament l’embrasement de ce monde. Sois témoin, sois témoin de l’envol gracieux. »

Son sourire se fait plus large, suintant presque comme une plaie de l’abysse noirâtre. Son regard s’ouvre plus en grand sur les deux soleils morts et ardents, les deux braises incandescentes dont l’éclat répond à l’astre mort échoué en contrebas derrière eux.

« Car ils portent de leurs serres notre joie, notre Feu. »

Thème 1:

Une vive douleur. La respiration est coupée. Un souffle venu de l’astre balaye l’île. Le cœur manque un battement. La souffrance se fait plus aigüe, comme un corps pris de panique quand sa vie est en danger. Une chaleur infernale émerge des alentours, comme un incendie s’étant soudain déclaré. Des cris. Et la symphonie qui offre un récital plus grandiose encore.

La main de la démone n’est plus visible, disparue dans le limon de noirceur, entre les côtes de Ferdinand. Ce dernier peut ressentir la caresse de ses doigts, l’emprise de ses griffes sur son cœur battant la chamade. L’horreur du corps étranger blasphématoire envahissant l’intimité des chairs, du sanctuaire de vie que nul ne devrait ainsi pénétrer. Le limon s’écoule. De la plaie. Dans la plaie. La noirceur se répand, souille l’intérieur des côtes, se glisse sur les poumons, enveloppe le cœur de son infecte présence.

À l’extérieur, en bas de la colline, entourant les deux protagonistes, les cris résonnent dans le récital joyeux : le monde brûle. Des flammes spectrales de la couleur des yeux de Zoroastra dévorent les villes et les cités miniatures. Les êtres minuscules s’agitent et courent en tout sens pour échapper au brasier, tandis que des ombres difformes les pourchassent sans pitié, dans un spectacle macabre, la mise à mort d’une existence reposant sur un mensonge et un péché originel. Le dernier rêve commence son festin.

« Mille blasphèmes, mille profanations, mille tourments sur notre chemin. Mais ensemble, nous reprendrons les rênes de notre destin. »

Mais bientôt, la douleur se dissipe, laissant place à un étrange sentiment de quiétude, un engourdissement qui à son tour évolue en quelque chose de plus plaisant. La peur s’étouffe, la joie prend sa place, la caresse immonde devient miséricordieuse. Le limon s’injecte entre les veines et les tissus, s’infiltre dans l’organisme en infection délicate, remontant le système fractal du corps à sa merci. Bientôt, voilà qu’une larme noire s’extirpe de sous sa paupière, suinte de son œil qui s’injecte d’obscurité, que quelques perles sombres surgissent de ses oreilles. Il sent le limon remonter sa gorge, gargouiller joyeusement contre sa langue, déborder à la commissure de ses lèvres d’un gout d’orge et de sucre.

Les cris laissent place à des chants d’allégresses, des rires et des cantiques d’acclamations. Dans les flammes qui dévorent le monde, le peuple danse, le peuple chante, le peuple exulte d’une même voix répondant à l’orchestre fou. Les bâtiments s’effondrent et la terre laisse le feu libérateur ravager sa surface, dévorer l’ancien pour permettre au nouveau de fleurir. Et le feu grimpe encore en intensité, ses flammes viennent lécher les cieux, une géhenne libératrice s’empare du songe crépusculaire, convier à sa renaissance que le monde attend, que le monde appelle de ses vœux.

Bientôt, Zoroastra extirpe lentement son avant-bras de la poitrine ouverte, laissant un trou béant en lieu et place du cœur de son apprenti. Un mouvement brusque et quelque chose cède, une gerbe de sang noir jaillit. Une dernière douleur, un frisson d’extase. Et dans son poing levé, la sorcière tient encore, palpitant et pulsant de vie, le cœur noir gorgé de limon licoreux de son apprenti.

« Toi qui recherches la liberté, je t’offre le salut. Je brise tes chaines et te permet de renaître. Deviens le bras armé de l’abysse, laisse la souffrance de ce monde te traverser, et fais-en ton manteau de feu dans les ténèbres de ce monde. »

Elle sert le poing, presse le muscle palpitant de vie, et le cœur s’embrase. Cette même flamme spectrale vient dévorer sa chair, nettoyer la crasse, l’excès de limon fertile. La douleur augmente encore plus que jamais, ainsi que le sentiment libérateur : en un même instant, joie, crainte, rage, rancœur, tristesse, espoir, folie, souffrance, déferlent en raz-de-marée dans l’âme qui vit sa propre transfiguration. Enfin, la flamme disparait, le cœur se solidifie entre ses doigts, morceau de charbon ou d’obsidienne poli comme un diamant. Délicatement, presque avec tendresse, Zoroastra repose le cœur dans son réceptacle. La plaie se referme aussitôt, ne laissant qu’une marque sombre, une cicatrice noircie qui s’étend sur son torse restauré.

La Sorcière l’observe un instant, semblant jauger quelque chose. Puis, elle lui sourit de nouveau, visiblement satisfaite.

« Ce que tu as ressenti était une étincelle de mon propre feu. Et ton cœur y a résisté. Tu es prêt pour ton ultime épreuve. » Sa voix est douce, forte, comme celle d’une mère ou d’une impératrice. « Si tu y survis, tu seras prêt pour m’accompagner dans mon pèlerinage. »

Délicatement, elle avance son visage et dépose un baiser sur son front. Sa main vient caresser sa joue avec tendresse tandis qu’elle lui murmure :

« Ferdinand, je t’offre ma souffrance. »

Le soutiens de sa main forte disparait.

Il perd l’équilibre et se sent tomber des hauteurs.

Zoroastra observe sa chute de la colline bigarrée.

En contre-bas, le soleil noir, ardent d’un feu impie, repose.

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